Samovar - Mc Clelland : A Chicagoland Pipe Collectors Club Selection

- Le meilleur jambon c'est celui-là. Les cochons sont en liberté, ils se nourrissent dans la forêt.
Je demande quatre tranches, elle en coupe une cinquième, qu'elle dévore sous mes yeux avec un petit sourire coupable.

Pas de vin, il faut bosser dur ce soir.
Va pour un Canard-Duchêne.

Je me retrouve donc au soleil en terrasse, avec un briquet, un tasse-braises, une bouteille de champagne, un fromage basque, un fromage italien, du jambon, Gogol par-dessus Crébillon, un calepin, un stylo vide qui écrit encore, un stylo plein qui n'écrit plus, un paquet de biscuits roses de Reims, un couteau rustique artisanal forgé dans une vieille faux rouillée, une coupe, des grillons qui bruitent, des crapauds qui se racontent des blagues de cul, une pipe marquée Pierre Morel, et une boîte de Samovar.

Les douces mélopées de "Boulangerie Pâtisserie" trottent encore dans ma tête. Quels excellents groupes nous avons en France ! Quel gâchis d'écouter les textes en langue angle ! Quel dommage que Macron ne soit p...

Oups ! J'interromps ma rêverie car soudain, je m'aperçois que ma coupe est vide.

Warn, spiritually satisfying, this dark, full Oriental Pipe Mixture is redolent with exotic Syrian Latakia.

Gnagnagna. Bof. A deux mots près on dirait un paquet de sous-marque de curry en boîte plastique.

Soothing as a cup of rich Russian tea.

Ca par contre, c'est pas banal. Un tabac qui est à la fois un sombre Oriental, un Syrien exotique et un Russe riche (avoue t'as hésité en prononçant "Ruche risse") : franchement, je demande à voir parce que l'arbre généalogique doit être savoureux (enfin ses feuilles quoi (nan je veux dire l'arbre à thé généalogique t'as vu (rhaaa faites chier))).

Ce fromage basque est vraiment une horreur. Comment peut-on bouffer cette merde. Dire qu'avec des brebis y'en a qui font du Roquefort.

Le Samovar a une odeur de ketchup comme tous les McClelland mais pas trop forte. Rapidement les arômes de fleurs prennent le nez comme dans le Skiff mixture.

Pas mal de brins noirs, et du très clair. Un peu de brins couleur caca, même pas 10% (faites pas les dégoûtés : le caca c'est du pipi en marron et en dur avec une odeur différente, c'est tout).

Je fais pas sécher parce que faire sécher c'est pour les tafioles, les cancres et les lingettes.

Les premières bouffées se têtent comme un lait. C'est bon mais pas assez fort, tu vois ? Tu cherches le goût alors tu tires de plus en plus.
Je connais ce goût.
Je le connais.
J'ai déjà fumé un tabac avec ce goût.
C'est chaud, c'est boisé, c'est très doux mais avec beaucoup de délicatesse, comme une liqueur de noisette sur de la mie de pain de maïs.
Il y a quelque chose de l'huile de lin.
Dis-moi, lecteur, c'est pas mal nan ? Liqueur de noisette, mie de pain de maïs, huile de lin : avoue que tu t'y croirais.

La seconde phase commence, le goût se précise et se corse.
Tiens, d'ailleurs j'aurais mieux fait de choisir un fromage corse. Bref.
Les fruits secs explosent ainsi que le cacao.

Aaah, le cacao.

Tu sais, le cacao que je déteste dans le Burley ?
Ben là c'est pas ça.

Ce cacao, c'est le cacao à 98% de chez slip en carbone.
Qui a dit "le seul valable" ? Très bien, 1 point de plus pour les lèche-culs.
Ce cacao, il est là, bien présent et tout, mais il reste bon et se mélange bien avec tout, sauf la cuisine anglaise (ha ha ha mais non, je plaisante - tout le monde sait bien qu'il n'y a PAS de cuisine anglaise, quelle sacré déconneur cet Evariste).
Donc, ce tabac anglais gère très bien cet ajout de cacao qui... je... hem, non rien.
Pouf, pouf, je recommence.

Donc, ce tabac allie à merveille les fruits secs avec une pointe généreuse de cacao.

Bizarrement, moi je suis pas conquis. J'aurais bien remplacé le cacao par une bonne tranche de pain grillé.

Une nouvelle phase s'engage. Le tabac devient épais, lourd, dense, magique. La fumée somnolente se comporte comme si elle influençait tout autour d'elle, imprime son passage, transforme les paysages et les pensées, et les hommes, et les dieux.
Un tabac russe, sans doute. Je cherche dans Les Âmes Mortes une explication sur le tempérament des tabacs russes. Je ne trouve pas.
Le tabac m'emporte, et la solitude me gêne. Je voudrais faire une belle rencontre sonore, hurler de grandes phrases, lier une amitié tonitruante à grands coups de vodka, et puis m'engueuler à mort avec le nouvel ami dans l'heure pour un sujet sans importance.

Le tabac continue à se corser et se corser, et à force de Corse il finit par sentir la chataîgne grillée. C'est pas mal.

Le fond de la pipe est constitué des écorces de chataîgne carbonisées. C'est moins bien mais on aura fumé pire.

Bon, je vous laisse, j'ai encore plein de boulot.

"Après s'être signé, suivant l'usage russe, il se mit à l’œuvre."
Gogol, Les Âmes Mortes

ça c'est de la revue

Belle revue,

Géniale ta revue Evariste

Toujours un plaisir de lire tes reviews.
Merci

Évariste à son meilleur ! 

Excellente review, du bonbon, comme toujours... 

Salut Evariste.
Je me disais bien avoir lu ça très récemment.
Dommage qu'il ne soit plus en production (sans doute définitivement).
A te lire encore cher ami

Superbe revue Evariste ! un vrai régal à lire