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Culotter une écume
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Culotter une écume
Le sujet a été mainte fois évoqué mais le voici par Georges Courteline
"Extrait de L'art de culotter une pipe
Ma femme m'ayant donné, à l'occasion de ma fête, une pipe en écume de mer, je ne fis ni une ni deux : je pris mon chapeau, je mis mes bottes et je courus fumer mon cadeau à la terrasse du petit café dont je suis l'habitué fidèle. Attablé depuis dix minutes devant une consommation, je regardais grouiller la foule en tirant de mon tuyau d'ambre des extases avec des bouffées, quand un vieillard vint à passer. A ma vue, il s'arrêta net ; il devint blême, puis livide, et tout à coup se précipitant sur ma pipe, il me l'arracha de la bouche en criant : " Misérable fou ! "
Mon premier mouvement fut de me lever et de reprendre à coups de poing mon bien. Par bonheur, mes yeux se fixèrent sur les cheveux de neige de mon agresseur, circonstance qui eut pour effet de me ramener à la modération. Je me souvins du De senectute, du passage si plein d'émotion où l'avocat des Pisons rend hommage à la vieillesse, dit les égards qui lui sont dus, rappelle qu'au temps où Athènes florissait, le Sénat, dans les jeux publics, se levait à l'entrée des plus vieux ainsi qu'à l'entrée des plus belles. Je me rassis donc et, simplement :
- En voilà un vieux trou-de-balle, dis-je. Voulez-vous bien me rendre ma pipe !
Lui, cependant, avançait vers ma face sa face aux lèvres balbutiantes, aux sourcils alourdis de haine. Ses regards, entrés dans les miens, fouillaient jusqu'au fond de ma pensée, comme pour y traquer des remords.
De cette voix profonde où gronde le trémolo des indignations qui se contiennent :
- Insensé ! reprit-il enfin. Quoi! vous avez une pipe d'écume et vous la fumez en plein air !!!
- Eh bien ? dis-je.
Il répondit :
- Eh bien ! de deux choses l'une : ou vous êtes un pauvre ignorant, ou vous êtes le dernier des hommes.
Ce langage plein de sévérité ne me laissa pas indifférent. Il me donna à supposer que j'avais commis sans le savoir quelque déplorable hérésie, en sorte que j'engageai le vieillard à me fournir des éclaircissements. je le priai en même temps de me restituer ma pipe, ce qu'il se montra prêt à faire ; mais, comme j'avançais les doigts pour m'en saisir, il la recula d'un geste brusque et avec de tels éclats de voix que les passants s'en émurent :
- Pas par là ! Pas par le fourneau ? A-t-on idée d'une chose pareille ? Vouloir prendre par le fourneau une pipe en écume de mer !
Étonné et vaguement inquiet, je l'allais prendre par le tuyau, quand :
- Pas par le tuyau non plus ! hurla de nouveau le personnage. Avez-vous perdu tout bon sens, que vous songiez, ayant une pipe en écume, à la prendre par le tuyau ?
Alors je me sentis plein de trouble ; et tandis que l'inconnu, ayant tapé ma pipe au zinc de mon guéridon pour en faire tomber le culot, la recouchait en la soie ponceau de son écrin qu'il refermait ensuite avec un soin pieux, je pris la parole en ces termes :
- Plus je vous regarde, plus je vous écoute, et moins je doute que je doive voir en vous un homme en dehors du commun. A mon sens, vous savez mille choses que je suis loin de soupçonner, mais surtout je vous crois passé maître en l'art singulièrement délicat de pratiquer la pipe en écume de mer. Je lis sur votre visage que j'ai deviné la vérité. Combien j'envie votre expérience ! Avec quelle volupté j'en recueillerais les fruits ? Mettez donc le comble à vos bienfaits ; prenez un siège, bon vieillard, acceptez une consommation, et inondez d'un flot de clarté les ténèbres inexplorées où croupit ma triste ignorance.
C'était un homme d'une grande bonté. Il se rendit à ma prière. Or, en cette journée mémorable, je devais à plusieurs reprises sentir des étonnements s'épanouir au fond de moi, ainsi que de larges fleurs.
Tout d'abord, ayant jeté les yeux sur la poche de mon veston où se carrait un paquet de scaferlati à la gueule béante et brune, il critiqua, non sans aigreur, cette obstination des fumeurs à ouvrir leurs paquets de tabac en faisant éclater la bande timbrée au cachet de la régie, qui les ligote d'un large et fragile ceinturon. Il exposa que la pipe d'écume demande à être bourrée contrairement au fil du tabac et dans le sens de la hachure, vu les lois de la pesanteur, l'attraction des corps par le centre de la terre et les tendances de la nicotine à se masser dans le fond de la pipe au lieu de se répartir avec une heureuse équité sur l'ensemble de la paroi . d'où l'obligation absolue de pratiquer l'opération césarienne aux paquets de cinquante centimes, sous peine d'exposer la pipe qui en recevrait le contenu à se voir culottée comme par un cochon. Il loua ensuite en termes chaleureux l'excellence de l'écume de mer, exalta les vertus sans nombre de ce calcaire qu'il compara, pour la susceptibilité, à la fleur du magnolia dont se flétrit la blancheur de porcelaine au plus léger attouchement. Mais comme il insistait sur ce point, en revenant toujours et sans cesse aux porosités de l'écume, "autant de cellules grandes ouvertes à l'encrassement du suint humain", j'objectai mon impuissance à réformer la nature, les vains efforts où je me fusse consumé en vue de m'opposer à la transpiration de mes extrémités supérieures. Je conclus en demandant par quel bout il convenait que je m'emparasse de ma pipe le jour où je voudrais la fumer, car encore fallait-il qu'elle passât par mes doigts avant d'arriver à mes lèvres.
Quelle devait être ma surprise !
- On ne prend une pipe d'écume ni par un bout ni par un autre, répondit avec gravité mon savant interlocuteur, si ce n'est la main gantée de fil. Je dis de fil ; car le moutonneux du gant de Suède n'est rien moins qu'un antre à microbes, et le chevreau, par son glacis, est ennemi de l'écume de mer dont il enveloppe le poli naturel d'un revêtement artificiel, vaguement oléagineux et tout à fait indélébile. Apprenez de moi cette vérité.
Il discourait d'abondance, élevant de temps en temps vers le ciel l'index de la conviction, et lâchant par-ci par-là des apophtegmes dans le goût suivant :
- L'écume de mer est parcelle de Dieu !
Ou :
- L'homme qui galvaude une pipe en écume de mer est un père qui conduit lui-même, dans le sentier de la débauche, la vierge qui lui doit le jour.
Ou :
- Qui rougit de son origine est indigne d'en avoir une, a dit un philosophe profond. Qui, ayant une pipe d'écume, n'a pas pour elle les égards qu'elle mérite, est indigne de la conserver, oserai-je ajouter avec lui.
J'étais dans l'admiration.
Il poursuivit :
- Si vous voulez mener à bien le culottage de votre pipe, il convient que vous la fumiez deux, trois ou quatre fois par jour (le détail est sans importance), mais toujours aux heures précises où vous l'aurez fumée la veille, en ayant soin d'aspirer les bouffées à intervalles réguliers : ceci dans une pièce bien close, carrelée en glaise de Hombourg, et d'une superficie non supérieure à huit mètres carrés et demi. Vous allez comprendre pourquoi. Le culottage n'est pas seulement dû à l'absorption du jus de tabac par une terre plus ou moins dense. Non. Il dépend dans une large mesure du milieu atmosphérique au sein duquel il se développe, et qui ne doit être ni trop échauffé ni trop froid. Vous comprenez donc l'avantage qu'il y a à fumer dans une pièce étroite, c'est-à-dire DANS UN AIR AMBIANT QUE LE FOYER INCANDESCENT CONTENU AU FOURNEAU DE LA PIPE ATTIÉDIT PAR LENTES GRADUATIONS : champ supérieurement favorable à la marche de l'opération entreprise! Quant à la glaise de Hombourg, elle lui est indispensable, étant reconnue pour contenir une certaine quantité de chlorure de calcium, par conséquent pour absorber l'humidité de l'atmosphère, laquelle n'est pas moins funeste aux pipes en écume de mer qu'aux personnes faibles de poitrine. C'est vous dire ce qui vous attend si, occupant un logement carrelé de glaise commune, vous ne faites procéder dès ce soir aux réparations qui s'imposent : votre pipe est fichue d'avance.
Là-dessus, il me demanda à quel étage j'habitais et sur lequel des quatre points cardinaux ouvraient les croisées de la chambre où j'avais coutume de fumer. [...]"
" />
"Extrait de L'art de culotter une pipe
Ma femme m'ayant donné, à l'occasion de ma fête, une pipe en écume de mer, je ne fis ni une ni deux : je pris mon chapeau, je mis mes bottes et je courus fumer mon cadeau à la terrasse du petit café dont je suis l'habitué fidèle. Attablé depuis dix minutes devant une consommation, je regardais grouiller la foule en tirant de mon tuyau d'ambre des extases avec des bouffées, quand un vieillard vint à passer. A ma vue, il s'arrêta net ; il devint blême, puis livide, et tout à coup se précipitant sur ma pipe, il me l'arracha de la bouche en criant : " Misérable fou ! "
Mon premier mouvement fut de me lever et de reprendre à coups de poing mon bien. Par bonheur, mes yeux se fixèrent sur les cheveux de neige de mon agresseur, circonstance qui eut pour effet de me ramener à la modération. Je me souvins du De senectute, du passage si plein d'émotion où l'avocat des Pisons rend hommage à la vieillesse, dit les égards qui lui sont dus, rappelle qu'au temps où Athènes florissait, le Sénat, dans les jeux publics, se levait à l'entrée des plus vieux ainsi qu'à l'entrée des plus belles. Je me rassis donc et, simplement :
- En voilà un vieux trou-de-balle, dis-je. Voulez-vous bien me rendre ma pipe !
Lui, cependant, avançait vers ma face sa face aux lèvres balbutiantes, aux sourcils alourdis de haine. Ses regards, entrés dans les miens, fouillaient jusqu'au fond de ma pensée, comme pour y traquer des remords.
De cette voix profonde où gronde le trémolo des indignations qui se contiennent :
- Insensé ! reprit-il enfin. Quoi! vous avez une pipe d'écume et vous la fumez en plein air !!!
- Eh bien ? dis-je.
Il répondit :
- Eh bien ! de deux choses l'une : ou vous êtes un pauvre ignorant, ou vous êtes le dernier des hommes.
Ce langage plein de sévérité ne me laissa pas indifférent. Il me donna à supposer que j'avais commis sans le savoir quelque déplorable hérésie, en sorte que j'engageai le vieillard à me fournir des éclaircissements. je le priai en même temps de me restituer ma pipe, ce qu'il se montra prêt à faire ; mais, comme j'avançais les doigts pour m'en saisir, il la recula d'un geste brusque et avec de tels éclats de voix que les passants s'en émurent :
- Pas par là ! Pas par le fourneau ? A-t-on idée d'une chose pareille ? Vouloir prendre par le fourneau une pipe en écume de mer !
Étonné et vaguement inquiet, je l'allais prendre par le tuyau, quand :
- Pas par le tuyau non plus ! hurla de nouveau le personnage. Avez-vous perdu tout bon sens, que vous songiez, ayant une pipe en écume, à la prendre par le tuyau ?
Alors je me sentis plein de trouble ; et tandis que l'inconnu, ayant tapé ma pipe au zinc de mon guéridon pour en faire tomber le culot, la recouchait en la soie ponceau de son écrin qu'il refermait ensuite avec un soin pieux, je pris la parole en ces termes :
- Plus je vous regarde, plus je vous écoute, et moins je doute que je doive voir en vous un homme en dehors du commun. A mon sens, vous savez mille choses que je suis loin de soupçonner, mais surtout je vous crois passé maître en l'art singulièrement délicat de pratiquer la pipe en écume de mer. Je lis sur votre visage que j'ai deviné la vérité. Combien j'envie votre expérience ! Avec quelle volupté j'en recueillerais les fruits ? Mettez donc le comble à vos bienfaits ; prenez un siège, bon vieillard, acceptez une consommation, et inondez d'un flot de clarté les ténèbres inexplorées où croupit ma triste ignorance.
C'était un homme d'une grande bonté. Il se rendit à ma prière. Or, en cette journée mémorable, je devais à plusieurs reprises sentir des étonnements s'épanouir au fond de moi, ainsi que de larges fleurs.
Tout d'abord, ayant jeté les yeux sur la poche de mon veston où se carrait un paquet de scaferlati à la gueule béante et brune, il critiqua, non sans aigreur, cette obstination des fumeurs à ouvrir leurs paquets de tabac en faisant éclater la bande timbrée au cachet de la régie, qui les ligote d'un large et fragile ceinturon. Il exposa que la pipe d'écume demande à être bourrée contrairement au fil du tabac et dans le sens de la hachure, vu les lois de la pesanteur, l'attraction des corps par le centre de la terre et les tendances de la nicotine à se masser dans le fond de la pipe au lieu de se répartir avec une heureuse équité sur l'ensemble de la paroi . d'où l'obligation absolue de pratiquer l'opération césarienne aux paquets de cinquante centimes, sous peine d'exposer la pipe qui en recevrait le contenu à se voir culottée comme par un cochon. Il loua ensuite en termes chaleureux l'excellence de l'écume de mer, exalta les vertus sans nombre de ce calcaire qu'il compara, pour la susceptibilité, à la fleur du magnolia dont se flétrit la blancheur de porcelaine au plus léger attouchement. Mais comme il insistait sur ce point, en revenant toujours et sans cesse aux porosités de l'écume, "autant de cellules grandes ouvertes à l'encrassement du suint humain", j'objectai mon impuissance à réformer la nature, les vains efforts où je me fusse consumé en vue de m'opposer à la transpiration de mes extrémités supérieures. Je conclus en demandant par quel bout il convenait que je m'emparasse de ma pipe le jour où je voudrais la fumer, car encore fallait-il qu'elle passât par mes doigts avant d'arriver à mes lèvres.
Quelle devait être ma surprise !
- On ne prend une pipe d'écume ni par un bout ni par un autre, répondit avec gravité mon savant interlocuteur, si ce n'est la main gantée de fil. Je dis de fil ; car le moutonneux du gant de Suède n'est rien moins qu'un antre à microbes, et le chevreau, par son glacis, est ennemi de l'écume de mer dont il enveloppe le poli naturel d'un revêtement artificiel, vaguement oléagineux et tout à fait indélébile. Apprenez de moi cette vérité.
Il discourait d'abondance, élevant de temps en temps vers le ciel l'index de la conviction, et lâchant par-ci par-là des apophtegmes dans le goût suivant :
- L'écume de mer est parcelle de Dieu !
Ou :
- L'homme qui galvaude une pipe en écume de mer est un père qui conduit lui-même, dans le sentier de la débauche, la vierge qui lui doit le jour.
Ou :
- Qui rougit de son origine est indigne d'en avoir une, a dit un philosophe profond. Qui, ayant une pipe d'écume, n'a pas pour elle les égards qu'elle mérite, est indigne de la conserver, oserai-je ajouter avec lui.
J'étais dans l'admiration.
Il poursuivit :
- Si vous voulez mener à bien le culottage de votre pipe, il convient que vous la fumiez deux, trois ou quatre fois par jour (le détail est sans importance), mais toujours aux heures précises où vous l'aurez fumée la veille, en ayant soin d'aspirer les bouffées à intervalles réguliers : ceci dans une pièce bien close, carrelée en glaise de Hombourg, et d'une superficie non supérieure à huit mètres carrés et demi. Vous allez comprendre pourquoi. Le culottage n'est pas seulement dû à l'absorption du jus de tabac par une terre plus ou moins dense. Non. Il dépend dans une large mesure du milieu atmosphérique au sein duquel il se développe, et qui ne doit être ni trop échauffé ni trop froid. Vous comprenez donc l'avantage qu'il y a à fumer dans une pièce étroite, c'est-à-dire DANS UN AIR AMBIANT QUE LE FOYER INCANDESCENT CONTENU AU FOURNEAU DE LA PIPE ATTIÉDIT PAR LENTES GRADUATIONS : champ supérieurement favorable à la marche de l'opération entreprise! Quant à la glaise de Hombourg, elle lui est indispensable, étant reconnue pour contenir une certaine quantité de chlorure de calcium, par conséquent pour absorber l'humidité de l'atmosphère, laquelle n'est pas moins funeste aux pipes en écume de mer qu'aux personnes faibles de poitrine. C'est vous dire ce qui vous attend si, occupant un logement carrelé de glaise commune, vous ne faites procéder dès ce soir aux réparations qui s'imposent : votre pipe est fichue d'avance.
Là-dessus, il me demanda à quel étage j'habitais et sur lequel des quatre points cardinaux ouvraient les croisées de la chambre où j'avais coutume de fumer. [...]"
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Gonzague- TBfan
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Re: Culotter une écume
la suite la suite
pepere- ANIMATEUR FR
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Re: Culotter une écume
Un régal Gonzague,je ne suis pas encore disposé à transformer les murs mon bureau avec de la glaise de Honbourg,mais c'est certain,le noble vieillard avait du répondant sur l'art de fumer l'écume,tout comme Courteline à nous tenir en haleine......un tout bon et agréable fil,merci.
Invité- Invité
Re: Culotter une écume
Un vrai gamin! et seulement si t'es sage et que tu as rangé ta chambrepepere a écrit:la suite la suite
Gonzague- TBfan
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Date d'inscription : 05/12/2008
Re: Culotter une écume
scrougneugneu halte a la dictature parentale
pepere- ANIMATEUR FR
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Re: Culotter une écume
Et il répond le bougre
Gonzague- TBfan
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Re: Culotter une écume
La suite
"J'entrai dans des explications, mais à mesure que je parlais, disant que j'étais sur la cour, que j'occupais rue NeuveèCoquenard un petit logement au cinquiéme, que mes croisées donnaient sur le midi et coetera, et coetera, lui s'effarait; il prenait des mines désolées, poussait de petites exclamations plaintives :
-Ah!... Eh!... Oh!... Mais c'est de la démence!... Mais ça passe la compréhension! Mais ce serait à crever de rire si ce n'était à pleurer de chagrin!...Au midi? Au midi? Vous avez une pipe d'écume et vous croyez que vous la culotterez dans un logement exposé au midi?
Il pouffa, apitoyé.
-Allons, c'est une dérision!... Mon cher Monsieur, il faut déménager tout de suite ou faire votre deuil de votre pipe.
-Mais...
-Croyez-moi; rentrez chez vous, donnez congé à votre concierge et allez demeurer à l'hôtel, chez un ami, dans une mansarde, n'importe où, pourvu seulement que vous preniez jour sur le nord!...
-Pourquoi ça ? demandai-je.
-Pourquoi ? -Pour échapper à l'action du soleil, parbleu ! qui est préjudiciable, au delà de toute expression, aux pipes en écume de mer !
-Comment, le soleil ?...
-Naturellement !... Le soleil, vous ne l'ignorez pas, a pour effet de hâler les objets. Or, qu'est le hâle, sinon une façon du culottage, et que prétendez-vous espérer, je vous le demande, d'une pipe à la fois culottée et à l'endroit et à l'envers, donc partagée entre deux forces égales, faites sinon pour s'anéantir, du moins pour se neutraliser en une teinte douteusement malpropre et saupoudrée de taches de rousseur comme le visage d'une vachère.
-Fort bien, dis-je. Puisque c'est comme ça, je vais prendre un parti énergique : je ne fumerai ma pipe que la nuit.
-Vous aurez raison, fit le professeur de culottage. Toutefois vous devrez prendre garde à ne pas la fumer plus de sept fois par mois.
-A cause ?
Il répondit :
-A cause de la lune, dont la lumière n'est sans danger pour les pipes en écume de mer que pendant le premier quartier.
Puis, ayant deviné ma stupeur au muet bâillement de ma bouche, il m'initia à certaines particularités de la planète en question. Il me dépeignit l'influence de cet astre, réputé mort, sui les êtres et sur les choses; son action sur les marées, sur les femmes et sur le collage du vin. Je sus ensuite que la lumière de la lune agit sur certains calcaires, au point de les ronger comme le vitriol ronge les pièces de cinquante centimes, à preuve la cathédrale de Meaux dont la façade s'effrite chaque jour et tombe peu à peu en poussière. Cet exemple me bouleversa, en m'ouvrant de fâcheux horizons sur le degré de résistance des pipes en écume de mer comparé à celui des cathédrales gothiques. J'appris enfin qu'il est urgent de ne point se servir d'une pipe en écume : 1 quand il fait beau, -à cause de la sécheresse; 2 quand il fait mauvais, -à cause de l'humidité. Ces curieuses révélations emplissaient mon âme de surprise, mais de consternation aussi, car je sentais en moi, lentement, s'infiltrer la terreur de ne jamais me trouver dans des conditions satisfaisantes."
"J'entrai dans des explications, mais à mesure que je parlais, disant que j'étais sur la cour, que j'occupais rue NeuveèCoquenard un petit logement au cinquiéme, que mes croisées donnaient sur le midi et coetera, et coetera, lui s'effarait; il prenait des mines désolées, poussait de petites exclamations plaintives :
-Ah!... Eh!... Oh!... Mais c'est de la démence!... Mais ça passe la compréhension! Mais ce serait à crever de rire si ce n'était à pleurer de chagrin!...Au midi? Au midi? Vous avez une pipe d'écume et vous croyez que vous la culotterez dans un logement exposé au midi?
Il pouffa, apitoyé.
-Allons, c'est une dérision!... Mon cher Monsieur, il faut déménager tout de suite ou faire votre deuil de votre pipe.
-Mais...
-Croyez-moi; rentrez chez vous, donnez congé à votre concierge et allez demeurer à l'hôtel, chez un ami, dans une mansarde, n'importe où, pourvu seulement que vous preniez jour sur le nord!...
-Pourquoi ça ? demandai-je.
-Pourquoi ? -Pour échapper à l'action du soleil, parbleu ! qui est préjudiciable, au delà de toute expression, aux pipes en écume de mer !
-Comment, le soleil ?...
-Naturellement !... Le soleil, vous ne l'ignorez pas, a pour effet de hâler les objets. Or, qu'est le hâle, sinon une façon du culottage, et que prétendez-vous espérer, je vous le demande, d'une pipe à la fois culottée et à l'endroit et à l'envers, donc partagée entre deux forces égales, faites sinon pour s'anéantir, du moins pour se neutraliser en une teinte douteusement malpropre et saupoudrée de taches de rousseur comme le visage d'une vachère.
-Fort bien, dis-je. Puisque c'est comme ça, je vais prendre un parti énergique : je ne fumerai ma pipe que la nuit.
-Vous aurez raison, fit le professeur de culottage. Toutefois vous devrez prendre garde à ne pas la fumer plus de sept fois par mois.
-A cause ?
Il répondit :
-A cause de la lune, dont la lumière n'est sans danger pour les pipes en écume de mer que pendant le premier quartier.
Puis, ayant deviné ma stupeur au muet bâillement de ma bouche, il m'initia à certaines particularités de la planète en question. Il me dépeignit l'influence de cet astre, réputé mort, sui les êtres et sur les choses; son action sur les marées, sur les femmes et sur le collage du vin. Je sus ensuite que la lumière de la lune agit sur certains calcaires, au point de les ronger comme le vitriol ronge les pièces de cinquante centimes, à preuve la cathédrale de Meaux dont la façade s'effrite chaque jour et tombe peu à peu en poussière. Cet exemple me bouleversa, en m'ouvrant de fâcheux horizons sur le degré de résistance des pipes en écume de mer comparé à celui des cathédrales gothiques. J'appris enfin qu'il est urgent de ne point se servir d'une pipe en écume : 1 quand il fait beau, -à cause de la sécheresse; 2 quand il fait mauvais, -à cause de l'humidité. Ces curieuses révélations emplissaient mon âme de surprise, mais de consternation aussi, car je sentais en moi, lentement, s'infiltrer la terreur de ne jamais me trouver dans des conditions satisfaisantes."
Gonzague- TBfan
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Date d'inscription : 05/12/2008
Re: Culotter une écume
Gonzague a écrit:Et il répond le bougre
même pas peur
pepere- ANIMATEUR FR
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Localisation : vaucluse
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pepere- ANIMATEUR FR
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Date d'inscription : 04/09/2010
Re: Culotter une écume
Le vieux de l'histoire c'est le paternel de bandit ? Non ? J'ai deviné ? Qu'est-ce que je gagne ?
Évariste- TBphile
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Localisation : Toulouse
Date d'inscription : 21/01/2012
Re: Culotter une écume
Excellent et quelle langue, un délice: merci.
YVES- TBphile
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Localisation : pays de france
Date d'inscription : 19/11/2009
Re: Culotter une écume
Merci beaucoup Gonzague!
Asmascega- TBphile
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Age : 35
Localisation : Breteuil (27; France)
Date d'inscription : 19/09/2012
Re: Culotter une écume
Tout bonnement merveilleux ! Quelle prose...
Merci cher Gonzague !
@pépère: je te vois maintenant avec un oeil nouveau
quel athlète, quel artiste, que diges,
quel virtuose tu dois être pour maîtriser ainsi un outil de fumage aussi capricieux
et ce, jour aaprès jour !
DAN- Administrateur
- Nombre de messages : 8430
Age : 64
Localisation : Repentigny, Québec
Date d'inscription : 17/05/2010
Re: Culotter une écume
Excellent !!
Stout- TBphile
- Nombre de messages : 4727
Age : 66
Localisation : Paris
Date d'inscription : 20/09/2012
Re: Culotter une écume
Ah ah ah. Excellent !
Bon, maintenant, une question pour Pépère : es-tu aussi maniaque ?
Tu ne fumes que face au nord, pas les nuits de pleine lune en face de ta fenêtre ou dehors, avec des gants blancs, à heures fixes, qu'entre 18°C et 22)C, avec un degré d'hygrométrie entre 35% et 60%, dan un endroit de 8 m² de surface ...?
Bon, maintenant, une question pour Pépère : es-tu aussi maniaque ?
Tu ne fumes que face au nord, pas les nuits de pleine lune en face de ta fenêtre ou dehors, avec des gants blancs, à heures fixes, qu'entre 18°C et 22)C, avec un degré d'hygrométrie entre 35% et 60%, dan un endroit de 8 m² de surface ...?
jitlord- TBjunior
- Nombre de messages : 263
Age : 50
Localisation : Region Centre
Date d'inscription : 16/12/2011
Re: Culotter une écume
non, je culotte une écume, seulement le 29 février, la nuit, vers 3h00 du matin, orienté vers le sud ouest, dans ma cave, a la lueur d'une bougie de couleur blanche(très important) avec un caleçon sur la tête, avec une température de - 5° (ce qui explique le pourquoi du caleçon)
voila pourquoi j'ai 5 écumes en attente de culottage
voila pourquoi j'ai 5 écumes en attente de culottage
pepere- ANIMATEUR FR
- Nombre de messages : 15134
Age : 63
Localisation : vaucluse
Date d'inscription : 04/09/2010
Re: Culotter une écume
@Pèpère :
Merci pour tes précieux conseils !
Cependant tu ne précises pas la couleur du caleçon : simple oubli ou intention malveillante pour planter les copains sur ce point sans doute tenu pour négligeable par le néophyte, mais ô combien capital pour tout pétuneur d'écume (les seuls vrais pétuneurs, on est bien d'accord ? ) un tant soit peu averti ?
En outre, certains anciens préconisaient le caleçon à motifs contre le caleçon uni : les premiers ne précisaient pas le motif exact, et les seconds restaient très vagues quant à la couleur du tissu.
Certains, encore, observaient l'importance du vent lors de fumages en intérieur.
Pourrais-tu nous éclairer sur ces questions, Pèpère ? s'il te plaît.
(aucune intention de ma part d'alimenter ici controverses et querelles, car pipe est Amour, fût-elle d'écume ou de bruyère)
Stout- TBphile
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Date d'inscription : 20/09/2012
Re: Culotter une écume
oups, erreur de ma part, mea culpa
il faut que le caleçon soit en pur coton et de couleur jaune,
ou a la limite en laine, mais uniquement laine de bélier d'Ecosse, et de couleur naturelle (très important)
les puristes (dans les temps anciens, au environ de 200 av JC) conseillaient de culotter une écume en faisant le poirier. j'ai essayer cette méthode, mais ayant deux mains gauche, j'ai eu droit a un séjour(hélas payant) a l'hôpital dans la section douleur des boyaux de la tête. donc je déconseille cette méthode a moins que l'infirmière
voila voila
il faut que le caleçon soit en pur coton et de couleur jaune,
ou a la limite en laine, mais uniquement laine de bélier d'Ecosse, et de couleur naturelle (très important)
les puristes (dans les temps anciens, au environ de 200 av JC) conseillaient de culotter une écume en faisant le poirier. j'ai essayer cette méthode, mais ayant deux mains gauche, j'ai eu droit a un séjour(hélas payant) a l'hôpital dans la section douleur des boyaux de la tête. donc je déconseille cette méthode a moins que l'infirmière
voila voila
pepere- ANIMATEUR FR
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Re: Culotter une écume
Ca tombe bien , je n'ai que des caleçons en laine de bélier d'Écosse et de couleur naturelle : portés sur le crâne, ça devrait moins gratter (j'ai des cheveux)
Merci Pèpère.
Merci Pèpère.
Stout- TBphile
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Date d'inscription : 20/09/2012
Re: Culotter une écume
Évariste a écrit:Le vieux de l'histoire c'est le paternel de bandit ? Non ? J'ai deviné ? Qu'est-ce que je gagne ?
Re: Culotter une écume
une merveille d'écriture
excellent
excellent
serbru- TBphile
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Re: Culotter une écume
Avis aux intéressés: une formation ésoterique s'impose afin de pouvoir fumer une écume. Merci Gonzague pour cette lecture passionante!
Dernière édition par Holmes le Jeu 4 Déc - 4:28, édité 1 fois
Invité- Invité
Re: Culotter une écume
Il devrait y avoir des BTS "culottage d'écume" ou d'autres formations sérieuses pour apprendre ça correctement. Et je vois bien pepere en prof dans cette formation là...
Asmascega- TBphile
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Re: Culotter une écume
Ah bon???? J'ai pourtant donné la meilleure technique pour le culottage d'une écume
pepere- ANIMATEUR FR
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